Aujourd’hui c’est le Rédac’ Chef de Runner’s qui se colle à l’interview du Pinkrunner, la classe encore non?

Tout d’abord, présentation de l’homme et du coureur aussi?
Savoyard d’abord. Très important ça. Si tout doit disparaitre, il restera toujours un morceau de tomme à grignoter quelque part dans un coin de montagne.
Parisien ensuite. Capital ! Difficile d’expliquer le rapport amoureux à une ville si souvent décriée. J’aime Paris.
J’ai 50 ans. Je suis célibataire. Je ne suis pas seul mais je vis seul. Que dire? C’est ma vie.

Comment en es tu venu à la course à pied, et pourquoi cette passion?
J’ai commencé à courir à New York en cessant de fumer. J’avais 34 ans. Je faisais beaucoup la fête. New York était une drogue. Courir dans Central Park est devenu le moyen ultime de canaliser le manque de nicotine. Et de contrôler mon poids. Moi qui n’avais jamais été un bon skieur, j’ai découvert du jour au lendemain que je pouvais courir. Plus qu’une révélation : un coup de foudre.

Qu’est ce qui t’as motivé à choisir ce sport plutôt qu’un autre ?
Nul au tennis, nul au foot, nul au golf, nul en tout. Et très réceptif à la grammaire du running… Un sens très montagnard de la méthode a fait le reste !

Comment choisis tu tes courses?
J’ai longtemps pensé qu’il fallait courir glamour : New York, Boston, Londres, Berlin. Aujourd’hui, je métisse : deux ou trois gros marathons dans l’année et des plus petits. Mais toujours, le désir de ressentir une émotion particulière.
J’ai couru près de 50 marathons. Et la liste me semble si longue encore de ces courses nécessaires…

Tu préfères quel type de courses : bitume, chemins, montagne?
Bitume. Je suis marathonien. 100%. Courir 42,195km me fait chialer rien que d’y penser.

Comment concilies tu ta vie familiale avec la CAP?
Je suis célibataire. Rien ni personne ne m’empêche de courir. Ma vie s’organise autour des entraînements.

Où se trouve ton parcours préféré pour courir ?
Ouille, question très compliquée !
Je n’en garde que trois : les Quais de Seine, Central Park et les Alpilles. On m’enlève l’un des trois et je m’écroule. Oui, un quatrième aussi : Miami Beach > je sais, ça fait nouveau riche mais il y a là-bas des personnes âgées dont j’admire la compagnie en courant…

Tu préfères courir seul dans ton coin, avec tes amis ou dans un club?
Je suis un solitaire. C’est mal et je le sais. J’ai toutefois des souvenirs de runs en peloton qui me donnent des frissons. Je pourrais parler pendant des heures de Jimmy et Momo, ces copains Maghrébins qui m’ont appris l’art très compliqué du courir ensemble. Avec eux, collés à eux, je sais que rien ne peut m’arriver.

Quel est ton plus grand souvenir de coureur ? Pourquoi celui là plus qu’un autre?
Berlin 2005 car je n’ai jamais couru aussi vite. 2h39’22. Je n’oublierai jamais le passage sous la Porte de Brandebourg et l’horloge d’arrivée au loin qui me disait que j’avais atteint l’objectif ultime de ma vie de runner. Tant d’autres
souvenirs aussi. De souffrances et de joie mêlées. Au final, ce que je retiens avant tout, c’est la fraternité dans l’effort et l’affection manifestée parfois juste après l’arrivée. Ces étreintes entre coureurs après des heures d’effort.
Peu de mots. Juste un geste d’estime et de respect. Rien ne vaut ça !

Quel est le pire ?
Sans doute la chute au 40è km de Berlin 2008. Je me suis relevé et j’ai fini comme un automate. Plus très lucide. Durant deux semaines, mon corps tout entier n’a été qu’un cri de souffrance. Lorsque le kiné me manipulait, je me mettais à pleurer. J’avais été trop loin. Et pourtant, je ne regrette rien.

Ton plus grand regret aujourd’hui?
Aucun regret. Je fais du mieux que je peux. Avec mes moyens. Chaque jour, je remercie le ciel de m’offrir ces années de pratique sportive si intensives et si harmonieuses.

Ta 1ère course c’était où et à quelle occasion?
Marathon de Paris 1996. Je n’en avais parlé à personne. J’ai couru (pas vite du tout) comme un clandestin. A l’arrivée, j’ai pleuré.

Tu fais d’autres sports?
Du vélo. Et j’apprends à nager. Mais ça ne rentre pas…

As tu un modèle de sportif et pourquoi lui ou elle?
Etrangement non. Mes modèles sont ailleurs. Je suis très admiratif de la discipline que s’imposent les danseurs et les musiciens classiques. Nous, runners, à côté sommes de vulgaires amateurs.

As-tu un objet essentiel ou un porte bonheur ?
Je prie à haute voix avant chaque départ (et lorsque j’en bave pendant une course). C’est tout.

Quel est ton rêve ou la course mythique à laquelle tu rêves de participer et pourquoi ?
The Comrades.